Séminaire de l’IAO. « Où en est la classe ouvrière chinoise ? Le cas de l’industrie du prêt-à-porter »

Gilles Guiheux, professeur à Université de Paris, chercheur au CESSMA et membre senior de l’IUF.

Résumé : La littérature sociologique consacrée à la classe ouvrière chinoise depuis 3 décennies a longtemps insisté sur les formes de domination et d’exploitation, conséquences de la marchandisation du travail et de la globalisation de l’économie. Elle a pointé les mauvaises conditions de travail et la faiblesse des rémunérations. Au début des années 2010, la montée des résistances a semble-t-il sonné le glas de ce modèle. Où en sommes-nous aujourd’hui ? Quelles sont les capacités de la classe ouvrière chinoise à faire valoir ses intérêts alors que la crise sanitaire entraîne dans son sillage une crise sociale d’une ampleur inégalée. Cette communication s’appuiera sur des enquêtes conduites auprès d’ouvriers de l’industrie de la confection.

Séminaire de l’IAO. « La fin du rêve migratoire : transformation de la relation économico-morale avec la diaspora dans un ancien village d’émigration, Shenzhen (Chine) »

Anne-Christine Trémon, anthropologue de la Chine, maître d’enseignement et de recherche à l’université de Lausanne.

Résumé : Les habitants natifs des villages d’émigration de Shenzhen ne sont plus les pauvres paysans dépendants de leurs riches cousins à l’outre-mer qu’ils étaient encore il y a quelques décennies. L’essor fulgurant de Shenzhen, mégapole chinoise dont ces villages sont devenus des quartiers, a rendu le départ à l’étranger moins attractif. J’examine comment, dans ce contexte de mutations accélérées, le sens conféré à l’émigration a changé en même temps que la relation économique et morale à la diaspora. Prendre pour objet cette relation a supposé de mener une enquête multisite, mais aussi multiscalaire, attentive aux actionnements d’échelle par les acteurs eux-même, ainsi qu’à la valence morale qu’ils confèrent aux échelles.

Séminaire de l’IAO . Ni science, ni religion : inventer les superstitions dans le Japon du début du XXe siècle

Matthias Hayek est maître de conférence à l’université de Paris-Paris Diderot, historien des croyances et des savoirs du Japon prémoderne

Résumé : Durant les deux premières décennies du XXe siècle, observe la multiplication d’ouvrages et de discours consacrés à la lutte contre un « ennemi » de la « modernité » en marche : les superstitions, meishin, ces croyances aussi fausses que désuètes, qui maintiennent le « peuple » dans l’ignorance et l’empêche d’embrasser de nouveaux idéaux.

Que sont exactement ces meishin, qui sont leurs détracteurs, et dans quel contexte intellectuel s’inscrit cette nouvelle critique ? En apportant quelques éléments de réponse à ces questions, nous verrons comment la création des superstitions procède autant de l’avènement de la science que de celui la religion moderne, toutes deux unies contre cet ennemi commun, cet héritage encombrant d’un passé qu’il fallait malgré tout valoriser pour construire la « patrie ».

Séminaire de l’IAO. Debate over “comfort women” and public memories in Taiwan

Mamié Misawa est Professeure à l’université Nihon (Tokyo), historienne du Taiwan colonial et spécialiste d’histoire du cinéma. Actuelle présidente de la Société japonaise des études taiwanaises, elle est professeure invitée à l’ENS de Lyon.

Speaking of the Japanese military’s sexual slavery “comfort women”, discussions have been centered on the Korean victims, although there also have existed Taiwanese victims. Why is it harder to receive the voices from Taiwan? This involves the difficulty of forming public memories among different ethnic groups in the process of pursuing the transitional justice of Taiwan after the democratization. This lecture summarizes the quarter-century debate over “comfort women” issue in Taiwanese newspapers since the emergence of the issue and examines the difference between two documentary films which depicted Taiwanese survivors of former “comfort women” in 1998 and in 2015.

Séminaire « Arts (Cinéma), Anthropocène, Asie »

Michale Boganim – « La Terre Outragée (2011) : une fiction sur Tchernobyl à l’ère de Fukushima »

Nous présenterons et commenterons des extraits de notre film, La Terre Outragée, qui est sorti en salles l’année de la catastrophe de Fukushima, en 2011, et évoquerons la réception du film au Japon où il a été projeté dans de nombreux contextes. Nous présenterons les jalons de notre réflexion sur les imaginaires en échos de Tchernobyl et de Fukushima, évoquerons les questions de mise en scène posées par la représentation d’un danger invisible. La catastrophe nucléaire étant un danger qui s’étend dans le temps sur plusieurs milliers d’années, nous évoquerons comment ce phénomène a influencé l’écriture du scenario. La Terre outragée évoquant la catastrophe, mais aussi l’après catastrophe ; ce que Paul Virilio a appelé « une catastrophe en devenir ».

Réalisatrice, née en Israël, diplômée de la National Film School de Londres, Michale Boganim a réalisé le film de fiction La Terre outragée en 2011 (avec Olga Kurylenko), le documentaire Odessa Odessa en 2005.

Consulter le programme détaillé du séminaire

Séminaire de l’IAO. Les œuvres d’art occidental dans la collection du musée Chimei à Taiwan

Liu Chiao-Mei est professeure associée à l’Université nationale de Taiwan où elle enseigne l’art contemporain et l’historiographie de l’art.

Résumé : Le musée Chimei à Tainan attire un grand nombre de visiteurs nationaux et d’amateurs d’art internationaux depuis son inauguration en 2015. L’immeuble classicisant du musée incarne l’idéal de palais d’art du fondateur, tandis que sa fontaine en fait un pastiche de palais italiens et de jardins de style versaillais. Inspirée par les visites de jeunesse du fondateur au musée d’éducation de Tainan, d’accès gratuit durant la période coloniale japonaise à Taiwan (1895-1945), la collection du musée Chimei illustre la manière dont une collection privée s’est développée en un musée d’art renommé dans le contexte de la croissance économique de l’Asie orientale depuis les années 1990. Cette conférence réfléchira sur les caractéristiques des œuvres d’art du musée et sur le rôle de cette collection en matière d’éducation et de recherche à Taiwan.

Séminaire de l’IAO. Les coulisses du monde (de) Guanyin : les facettes sociologiques d’un pèlerinage dans la Chine contemporaine

Claire Vidal , Anthropologue spécialiste de la Chine, maître de conférences à l’Université Lumière Lyon 2 affiliée à l’IAO

Résumé : L’île du Putuoshan accueille des milliers de voyageurs venus d’Asie pour rendre un culte au bodhisattva Guanyin espérant bénéficier de ses faveurs. Transformé par les mutations récentes de la société post-maoïste, le Putuoshan est multiple; c’est tout à la fois un haut lieu de pèlerinage depuis le Xe siècle célébré comme l’une des quatre montagnes saintes du bouddhisme chinois, et un site touristique riche d’une économie presque entièrement tournée vers les activités d’accueil. Se rendre sur l’île où Guanyin se manifeste, c’est faire l’expérience de sa présence, suggérée ou mise en scène par le biais de dispositifs spatiaux, mythologiques et technologiques. Arrivés sur le site, les voyageurs imaginent alors leur pèlerinage façonnant leur propre expérience du divin.

Séminaire de l’IAO. L’abolition des frontières de genres : regards sur le film coréen Mother de Bong Joon-ho 2009

Safa Gharsalli, docteure en sciences culturelles, chercheuse associée à ENS Lyon, IAO, maitre-assistante de l’enseignement supérieur à Institut supérieur des Beaux- Arts de Sousse/ Tunisie.

Résumé : Nous examinerons l’esthétique de la « réappropriation » des genres dans le cinéma coréen à travers l’œuvre Mother de Bong Joon-ho qui a fait jaillir une nouvelle approche cinématographique. Notre attention voyagera de ladite réappropriation des genres vers l’emparement de l’œuvre cinématographique d’un cinéma d’auteur à la recherche d’une image rythmique et pathétique. L’étude visera l’évolution perpétuelle de la trame narrative vers un éclectisme spécifique qui le différencie de celui adoptant une cadence narrative qui est considérée comme un courant habituel du cinéma asiatique.

Séminaire de l’IAO. Les shunga 春画 (Images de printemps) dans le Japon d’Edo (XVIIe –XIXe s.)

Pierre François Souyri, Professeur émérite, université de Genève, historien du Japon

Résumé : L’époque d’Edo (1603-1867) se décrit souvent elle-même comme ouverte à un « esprit de plaisir ». Les images de printemps s’inscrivent dans un contexte qui a évolué au cours des siècles sans se déprendre pour autant de cet esprit de plaisir, parfois réprimé. Plus qu’une représentation réaliste des mœurs, les estampes érotiques étaient des allégories du plaisir sexuel tel qu’il était alors fantasmé mais par leur accessibilité à toutes les couches de la populations, femmes et hommes, elles eurent une dimension de phénomène social qui interpelle l’historien.

Séminaire de l’IAO. Colonisation et transformation des territoires au Cambodge

Mathieu Guérin, maître de conférence à l’INALCO (UMR8170 CASE), historien du Viêtnam

Résumé : La colonisation européenne s’est accompagnée d’une prise en charge de territoires, à différentes échelles, par les colonisateurs. Comme le montre l’exemple de la Terre de Kampong Svay au Cambodge, devenue résidence puis province de Kampong Thom, cette intervention extérieure a entrainé une redéfinition des territoires, de leur espace, de leur gouvernance, de leur rapport à l’État et de leur économie. Les paysages et l’environnement porte les traces de ces évolutions. Leur étude permet de saisir les conséquences tant sociales, politiques, économiques ou environnementales de la colonisation européenne pour les Cambodgiens aux XIXe et XXe siècles.